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L'espoir venu d'ailleurs

2078, les êtres humains vivaient dans la peur. Ils savaient, depuis plusieurs années, qu'une énorme météorite allait s'écraser sur la terre, détruisant ainsi l'humanité.
Malgré le fait qu'ils l'avaient vu venir, il n'y avait aucun moyen d'y échapper. La conquête spatiale n’était pas encore assez avancée, il était  impensable d'aller se réfugier sur une autre planète.
Cette météorite arrivait quelques décennies trop tôt pour nous.
Tout ce nous pouvions faire, c’était d'attendre notre fin, espérant un miracle.
Et, contre toute attente, le miracle eut lieu. Et il venait de l’espace. Les scientifiques avaient capté un message, venant de la galaxie d'Andromède. Venant d'une race encore inconnue, une race extraterrestre.
La joie d'avoir enfin la réponse à une des questions de l'humanité, qui est "sommes-nous seuls dans l'univers", était faible, vu les circonstances. Après tout, l'humanité allait disparaître.
Malgré cela, les chercheurs étudiaient ce message, et s’efforçaient de le traduire.
Ils ne purent contenir leur joie quand ils annoncèrent qu'ils avaient enfin décrypté le message, et que celui ci était un nouvel espoir pour l'humanité.
Le message disait simplement :


"Nous venons vous aider."


S'en suivit une période de fête sur la Terre. Finalement, nous n'allions pas tous mourir ! Une race extraterrestre, sûrement en avance sur nous niveau technologie, allait venir nous sauver !
Et, de plus, nous allions enfin rencontrer des êtres d'une autre planète, et ils n'étaient pas hostiles !
Les scientifiques avaient répondu à ce message. Ils avaient envoyé, avec des appareils sophistiqués, spécialement conçus pour ça, le message suivant :


"Nous vous attendons. Le peuple de la Terre vous remercie pour votre aide".


Plusieurs jours ont passé après cela, et pas un signe de nos nouveaux amis de la galaxie d'Andromède. Mais qu'importe, ils avaient promis de venir nous aider, et la météorite n'allait s’écraser que dans quelques mois.
Puis vint enfin le jour où nous avons reçu une réponse de leur part. Une réponse qui nous fit basculer dans notre profond désespoir, dont nous pensions être enfin sortis pour de bon.
Leur réponse était :


"Notre message ne vous était pas destiné".

Texte de Kamus

Pensées volatiles

Tic-Tac

C'est le seul bruit qu'on entend dans cette salle de classe. Tout le monde a l'air d'avoir étudié pour cet examen. Enfin, tout le monde, sauf moi. Ma feuille est toujours vierge. Comme moi, d'ailleurs. Marie m'a encore mis un râteau la semaine dernière. Regardez-la, écrivant à toute vitesse sur sa feuille. Évidemment, quand on a des parents riches, qui vous payent un professeur particulier, tout devient plus facile. De toute façon, je n'ai aucun sentiment pour elle. C'était juste histoire de perdre enfin ma virginité.
Et il y a plein de poissons dans l'océan.

Tic-Tac

Marion a un certain charme. Tiens, elle a l'air de ne pas connaître certaines réponses. Son petit air chafouin la rend plus mignonne d'une certaine façon. Est-ce qu'elle a un copain ? Il faudra que je me renseigne.

Tic-Tac

L'heure passe trop lentement quand on n'a rien à faire. Je ne peux même pas sortir mon portable de peur de me le faire confisquer. Tout le monde a l'air d'être à fond sur sa copie. Même ce gros lard de Lucas. Regardez-moi ce gros porc. Je me demande comment il peut être aussi gros alors qu'on lui vole toute sa bouffe à la cantine. Il ne sait que pleurer, même quand on le tabasse, il ne réplique pas. Après les cours, je vais aller lui taxer ses thunes, ça lui fera ça en moins pour s'acheter des hamburgers. Quel loser.

Tic-Tac

Je m'ennuie grave. Ah, ça y est, Claudio a l'air d'avoir fini. Peut être va-t-il rendre sa copie et demander à sortir de la classe ? Ça serait bien, comme ça, je sortirai en même temps. J'ai bien envie de me rouler un petit joint, mais je n'ai plus de tabac, et lui en a toujours.
Et de toute façon, s'il n'en a pas, avec le fric de l'autre gros porc, on ira en acheter.

Tic-Tac

Bon, à priori, on n'a pas le droit de sortir avant la fin. Cette horloge commence à me taper sur les nerfs. Putain, y a Lucas qui me regarde. Pourquoi il sourit, ce con ? J'ai bien envie de lui crier de baisser les yeux. Putain, je vais lui en coller de belles à la sortie.

Tic-Tac

Bientôt la sonnerie, j'en peux plus. J'en peux plus de n'entendre que cette putain d'horloge. L'autre connard me regarde encore. On dirait un psychopathe. Pourquoi il sourit comme ça ?

Tic-Tac

J'ai un mauvais pressentiment. Mais... attends...
Il n'y a jamais eu de putain d'horloge dans cette salle de classe !

Boom

Texte de Kamus

Lâches

La guerre a de nombreux visages. Nous connaissons tous le front et ses horreurs, de Verdun à Sarajevo, la mort et la désolation. Nous connaissons tous ces récits de soldats, ceux des grandes batailles et des survivants, tous ces héros et ces salauds qui font l’Histoire. Ce que l’on connaît moins en revanche, ce sont les témoignages de trouillards, de vermines. Ces gens médiocres qui cèdent à la peur panique causée par le conflit. C’est ce que je vous propose aujourd’hui.

Ils sont trois à courir comme des damnés dans des champs dévastés par les obus. Ils sont crevés, la poitrine en feu, mais aucun ne songe à faire une pause. Ce sont des déserteurs, et seule la potence attend ceux qui se font attraper. Oh, ils ne sont pas fiers de fuir le front, d’abandonner leurs camarades et de trahir ainsi leur pays. Tous ont un goût amer dans la bouche et pleurent d’être aussi faibles. Peut-être que plus qu’aux sanctions, c’est à la honte qu’ils tentent de se soustraire. Fabrice est différent de ses compères, lui est satisfait de son choix et pour rien au monde ne reviendrait en arrière. Trop de tranchées, de cadavres, de rats et d’absurdes offensives meurtrières. « Que l’état-major monte au créneau et nous en reparlerons ! » s’était-il dit avant de prendre sa décision.

La course dura toute la nuit, du crépuscule à l’aube. Ils prirent finalement une pause dans une petite clairière à l’orée d’une forêt. S’adossant à un arbre, Henri s’exclama fébrilement :

« On ne peut pas s’arrêter longtemps, on va se faire choper sinon. »

Fabrice répondit par un hochement de tête, les paumes appuyées sur ses genoux. Auguste, tout autant en nage que les autres, tentait vainement de faire croire le contraire en bombant le torse. Il rétorqua à ses camarades :

« Il est inutile de gambader au hasard dans la nature, on va s’épuiser et en plus, on est facile à pister. Non, faut qu’on trouve une planque ou des chevaux. Sans ça, dans trois jours, on se balancera au bout d’une corde. »

Les autres avaient l’air convaincus par les arguments de l’homme. Ils n’avaient du moins pas la force ou l’envie de rentrer dans un débat. Fabrice renchérit :

« Et où allons-nous trouver une planque et des chevaux ? Ce coin à l’air complètement mort et, en plus, on ne sait même pas où on est. - On suit la route, il y a des chances qu’on tombe sur un patelin, compléta Henri avant d’être coupé par Auguste. - Et là, on se sert du fusil pour braquer les habitants du bled. On récupère ce dont on a besoin, tout en se débarrassant de ces uniformes. Et arrêtez de me fixer avec vos yeux puant la couardise, je vais m’en charger. »

Bien sûr, cette dernière occurrence était avant tout un moyen pour lui de s’affirmer en tant que chef du groupe. Il avait toujours aimé diriger et être obéi, cela n’allait pas changer en cavale. Tous se mirent donc en route en longeant le sentier de terre. Les trois soldats ne prononcèrent pas un mot durant de longues heures, jusqu’à ce qu’un vieil homme en charrette croise leur chemin. Auguste se mit en travers de la route et le vieillard tira sur les cordes de son attelage pour stopper ses animaux de trait. L’obstruant leva la main en signe de paix, et questionna d’une voix exagérément forte son interlocuteur.

« Bonjour monsieur, pouvons-nous savoir où vous allez et avec quelles marchandises ? »

Le vieux sembla troublé par la question.

« Eh bien, soldat, je livre ces vivres et cet alcool au front. Mais qui êtes-vous ? Qu’est-ce que vous faites aussi loin du front sur ce chemin perdu ? »

Les larrons essayèrent de contrôler leur anxiété mais la tâche se révéla particulièrement ardue. Auguste s’approcha d’un tonneau, suivi du regard par son propriétaire. Il fit couler un peu de vin, le but et le recracha.

« Cela ne te concerne pas. Tu as l’air suspect, nous allons donc réquisitionner ta charrette jusqu’à ton point de départ où nous inspecterons ton stock. »

Henri, qui commençait à trembler, braqua son arme sur le conducteur.

« Je ne vous suivrai pas. J’ai ici une lettre du capitaine Ernest certifiant de mon honneur. Vous n’avez pas l’autorité pour me mettre aux arrêts ! » Henri tremblait de plus en plus. « Maintenant, cessez cette comédie et laissez-moi passer où vous aurez des problèmes avec lui ! » lança l’inconnu.

Henri tira un coup de feu directement dans la poitrine du bonhomme interrompant brusquement son discours. Contrairement aux apparences, ce coup ne fut pas tiré par erreur ou accident, certainement pas. Henri avait pressé consciemment la détente par crainte que ses compagnons ne se dégonflent et ne laissent la charrette filer. Les deux complices le regardèrent, interloqués, mais aucun ne formula de reproche. Ils étaient tous trop heureux de pouvoir reposer leurs pieds et sauver leurs peaux en même temps. Fabrice enfila les frusques du cadavre et ils cachèrent le corps dans la forêt avant de reprendre la route. Les deux autres se dissimulèrent sous une bâche au cas où ils croiseraient un autre passant.

Le groupe poursuivit sa route mais préféra s’éloigner de l’itinéraire entamé par le vieil homme afin d’éviter de croiser d’éventuelles connaissances qui pourraient reconnaître la charrette. Ils quittèrent la voie principale pour prendre une route tortueuse qui s’enfonçait dans la forêt. Cette dernière était accueillante et il s’en dégageait une petite odeur de noisette. Les feuillages étaient d’un vert éclatant et le soleil éclairait magnifiquement bien les lieux. Ces petits détails influencèrent beaucoup le choix du trio. Quelques heures plus tard, le jour déclinant, un village apparut au détour d’un croisement. Une petite bourgade rustique assez typique du Nord-Est de la France qui, coup du destin, avait l’air intacte. Les rares habitants qui étaient dehors restèrent cois puis rentrèrent chez eux à la vue de Fabrice. « Une bande de péquenots » pensa celui-ci. Une jeune femme s’approcha de lui. Il remarqua qu’elle ne devait pas avoir plus de quatorze ans. De longs cheveux noirs cachaient une partie de son visage. « Joli visage. » se dit le cocher, avec ses yeux d’un vert pâle et ses lèvres pulpeuses. Il lui fit un grand sourire puis la salua.

« Bonjour monsieur, je peux vous demander ce que vous venez faire dans notre paroisse ? » dit-elle avec un ton se voulant être le plus respectueux possible. - Tu peux, ma jolie. Nous… Je cherche un endroit où passer quelques jours, histoire de me reposer avant de reprendre la route. Tu en connais un, par hasard ? - Nous n’avons pas d’auberge, mais si vous avez un peu d’argent, ma grange vous est ouverte. - Pas vraiment, mais je peux te laisser un tonneau de vin en échange. T’es d’accord, ma puce ? »

Avec les restrictions et les réquisitions engendrées par la guerre, il savait que la fille allait sauter sur cette occasion en or.

« C’est une super idée ! Je vous conduis tout de suite chez moi. »

Sur le chemin, Madeleine confessa qu’elle vivait seule depuis 1914, son père étant conscrit et sa mère engagée en tant qu’infirmière dans un hôpital de campagne. Elle était très inquiète, voilà plusieurs mois qu’elle n’avait plus de nouvelles d’eux. Elle souhaitait alors savoir s’il avait quelques informations à ce propos. Ce n’était pas le cas.

La ferme de la jeune dame était en périphérie du bourg, une petite exploitation d’orge et de blé. Quelques bêtes étonnamment grasses dormaient dans un champ voisin. Le véhicule s’arrêta dans la petite grange gorgée de foin. La gamine quitta son invité en lui promettant de lui apporter un repas chaud le lendemain matin. Les deux passagers clandestins sortirent vite de sous la bâche en s’étirant longuement.

« Eh bien, nous voilà au moins en sécurité, commenta Auguste. - On va vraiment dormir dans cette grange pendant plusieurs jours ? Il fait un froid de canard, on va crever gelés, reprit le second. - Qu’est-ce que tu veux de plus, on ne va pas braquer la gosse. On dort là pendant un ou deux jours, on ira dans autre patelin refourguer toute cette merde. Ensuite, on passe la frontière suisse ou espagnole, pourquoi pas aller en Amérique. »

Le ton du chef de fortune était très autoritaire, il ne souhaitait pas un dérapage avec les habitants du coin et craignait une éventuelle foule en colère sortant fourches et torches. Les deux types étaient trop fatigués pour remarquer le silence du troisième. Ils se mirent donc d’accord pour éviter les vagues et se firent discrets en attendant de partir. Ils dormirent emmitouflés dans le foin et la chaude bâche de laine. Fabrice, lui, dut dormir avec la couverture que lui confia Madeleine. Il ne parvint cependant pas à trouver le sommeil. L’odeur de la fille imprégnait le tissu, il adorait ce parfum. Voilà des années qu’il n’avait pas vu sa femme ou même connu la chaleur d’une autre. Il se tournait, se retournait pour essayer de s’assoupir, en vain. Moult images et divers scénarios défilaient dans sa tête, impliquant Madeleine et lui. Il ne pourrait dire combien de temps s’était écoulé, mais la nuit était noire.

Entendant ses camarades ronfler, il se leva et prit la direction de la maisonnée. Les alentours étaient particulièrement brumeux, impossible de voir à plus de trois mètres. Seule la lointaine lumière filtrant à travers les vitres de la chaumière permettait au soldat de se repérer. La température était glaciale mais cela lui importait peu, il ne la sentait même pas. Tel un possédé, il arriva à la fenêtre où il vit l’objet de son fantasme. Madeleine était couchée, son lit près du feu de cheminée éclairant toute la pièce. Bien qu’elle portait une nuisette laissant une large place à l’imagination, il aimait regarder ses formes et sa poitrine qui n’étaient pas cachées par la couverture. Il baissa son pantalon, empoigna son membre et commença un va-et-vient. Cela ne lui suffisait pas, il lui fallait plus. Il fonça vers la porte d’entrée. Dans son excitation, il ne nota pas que la brume s’était doucement approchée de lui, elle pouvait à présent lui lécher le visage. L’accès verrouillé, il tourna la poignée dans tous les sens puis donna un violent coup d’épaule dans le bois solide. La jeune fille se réveilla en sursautant. C’est à ce moment-là que Fabrice entendit un bruit assourdissant, une éructation inhumaine qui le perturba profondément, émanait de la brume. Il ne pouvait dire d’où provenait exactement le son. Terrorisé, l’ancien soldat remonta son pantalon et courut à toutes jambes vers ses compagnons. Il put voir, par la lucarne, l’adolescente réfugiée sous ses draps. Le brouillard s’épaississait à vue d’œil, impossible de retrouver son chemin. Fabrice se retourna dans tous les sens, essayant de repérer l’adversaire. Il entendit une multitude de rires enfantins, des rires qui avaient quelque chose d’inhumain. Ces sons ne pouvaient pas provenir de quelque chose de terrestre. C’est à ce moment-là qu’il vit ce qui le menaçait. Il hurla comme il n’avait jamais hurlé.

Henri et Auguste se levèrent brusquement lorsqu’ils entendirent le beuglement de leur ami. Se précipitant à l’extérieur fusil en main, les deux hommes ne purent le rejoindre à cause de l’opacité de la brume. En courant vers le hurlement, ils tombèrent seulement sur les vêtements décharnés et ensanglantés de Fabrice. L’innommable éructation recommença et d’un accord tacite immédiat, ils coururent vers la maison. Les rires se firent de plus en plus oppressants, de plus en plus proches. Une main attrapa la jambe d’Auguste, une petite main blanche couleur crème dont les doigts étaient extrêmement longs et griffus. En forçant brutalement, il réussit à se défaire de l’emprise mais les griffes l’avaient profondément blessé. La porte en chêne ne tint pas face aux assauts multiples de cette chose. Les fuyards investirent en vitesse l’abri et barricadèrent la porte avec les meubles les plus massifs qu’ils trouvèrent. On pouvait entendre les murs être grattés de toutes parts et des chuchotements incompréhensibles. Le blessé s’assit sur le premier siège à sa portée et pressa ses blessures en poussant de petits gémissements. Effectuant un garrot, son camarade remarqua que la plaie noircissait et cette tâche sombre se répandait sur le reste de ses membres. Auguste était fiévreux, convulsait par à-coups. Henri sortit donc violemment Madeleine de son lit, tétanisée, pour y installer le malade qui se trouvait alors dans un semi coma. Il la saisit par les deux épaules et gueula.

« C’est quoi ça !? Qu’est-ce qui se passe !? »

Il eut pour seul réponse quelques pleurs.

« Réponds, bordel de merde ! »

Elle continuait à pleurer. Il gifla sans retenue la pauvre fille qui s’effondra sur le sol, il saisit son arme et pointa le canon sur elle.

« Parle, ou je te fusille comme un chien ! »

Madeleine essuya le sang et la morve coulants de son nez puis commença à bafouiller.

« Ça arrive, pour vous… »

Devant le regard circonspect et plein de haine de l’homme, elle reprit.

« Nous lui offrons les voyageurs attirés par… Ne me tuez pas, pitié. - Qu’est-ce qui arrive ! S’époumona Henri. - Ça », pleura la gamine.

Une seule question vint à son esprit, simple et sans fioriture.

« Pourquoi ? - Ça nous protège de la guerre et de la faim. - Comment on l’arrête ? » demanda-t-il, la voix tremblante.

« Je ne sais pas. »

L’adolescente reculait tout en répondant, comme pour échapper à une éventuelle balle. Henri baissa son arme et fouilla de fond en comble la demeure avec l’espoir de trouver une solution miracle. Les grattements se transformèrent en raclements puis en coups. Les chuchotements devinrent de plus en plus forts jusqu’à devenir un véritable cœur anarchique psalmodié dans une langue gutturale inconnue. Madeleine rampa sous son lit et se mit en position fœtale en espérant échapper au sort des étrangers. Auguste convulsa, comme lors d’une crise d’épilepsie, la souillure noire se répandait sur tout son être dans un maelström de douleurs indescriptible. Henri accéléra sa fouille, détruisant le mobilier et cherchant dans les endroits les plus incongrus. C’était sa manière de ne pas céder à la panique. Les murs commencèrent à se craqueler, comme de la peinture trop ancienne. La brume se répandit dans la pièce, submergeant le lit puis toute la maison. Henri pouvait seulement discerner un son d’os broyés dans le vacarme sortant de la brume. Il tira un coup de feu, essayant de viser en direction du bruit. Cela n’eut aucun effet. Pendant qu’il rechargeait son arme, une silhouette énorme, asymétrique avec une multitude d’appendices approcha. Elle était secondée par un cortège de figures humanoïdes de petites tailles. Leurs corps étaient totalement disproportionnés. Certains avaient une tête colossale, d’autre une jambe et un bras plus longs que le corps et les traînaient en marchant. Lorsqu’ils s’approchèrent suffisamment pour que le malheureux puisse les voir distinctement, il ne poussa ni hurlement ni gémissement, son cerveau était paralysé par cette vision. Ses yeux ne purent admettre l’existence d’une telle horreur et s’éteignirent. Ce fut ensuite son cœur qui ne put supporter autant de terreur.

La dernière chose qu’entendit Madeleine cette nuit-là fut un coup de feu et un bruit d’os broyés. Elle ne sortit de sa cachette que bien plus tard, suite aux appels de riverains. Elle courut se blottir dans les bras de Léopoldine, sa chère voisine. Alphonse, son mari, la rassura. « Ne t’en fais pas ma petite, nous allons tous t’aider à reconstruire ta maison. - Est-ce que ça fonctionne, est-ce que nous sommes à l’abri de la guerre ? Répondit-elle, la voix étouffée par la poitrine de Léopoldine. - Oui, ma chérie. Nous payons pour cela. » assura doucement la voisine en lui caressant paisiblement les cheveux.

Texte de Wasite

Le pommier de Monsieur Fergunson

Dès qu’il l’avait vu, il lui avait déplu. Ce n’était pas que M. Fergunson était très capricieux ou trop exigeant, mais voir de sa chambre ce grand pommier planté en plein milieu du jardin le déprimait.
Sa vieille voisine l’avait pourtant prévenu lorsqu’il y avait emménagé. Un blabla en patois mal articulé autour d’un certain tueur, de sa dernière demeure, de son cadavre disparu, etc... M. Fergunson n’avait alors même pas cherché à lui expliquer. Il avait assez d’expérience pour savoir que les gens ne le comprendraient jamais, même ses proches. Mais malgré tout, il aimait ça. Les faits divers, les histoires morbides, les films d’horreurs... à 63 ans, c’était sa seule préoccupation. Alors quand il avait vu cette maison à vendre, son histoire sanglante, située près de la côte, avec cet immense jardin...et son unique arbre, il n’avait pas hésité.


Inutile de dire qu’aujourd’hui, il regrettait vivement son choix.
De toute façon, il ne pouvait pas être aidé par cette vieille femme. Elle était morte. Une des plus grosses branches de l’arbre l’avait écrasée dans son propre jardin, alors qu’elle arrosait ses fleurs. Il n’avait pu que se ruer hors de la maison, et y découvrir le macabre spectacle qui s'offrait à lui.
M. Fergunson frissonna. Il valait mieux ne pas penser à ça. Il se retourna alors dans son lit, vers la fenêtre...et vit l’arbre. Il se sentit soudain très vieux et très fatigué. Il regarda ses mains couvertes de terre. Tous ces événements le dépassaient.
La police était venue chez lui. Le retraité s’en était bien sorti. Les agents lui avaient juste demandé de faire venir un élagueur, sans poser plus de questions. Quelques jours plus tard, celui-ci était donc monté sous l’œil attentif de Fergunson, jusqu’à disparaître dans les feuillages...sans jamais en redescendre. Disparu. Volatilisé. Le pauvre homme était alors allé se coucher, les yeux fixés sur l’arbre, ne parvenant pas à trouver le sommeil. Il n’avait trouvé qu’une casquette, 2 jours plus tard, au pied de l’arbre.
Il soupira.
Par chance, s’il pouvait encore parler de chance, on n’avait trouvé aucune preuve que l’élagueur était venu chez lui. En effet, il aurait vraiment eu du mal à expliquer ces deux morts à trois jours d’intervalle.
Puis il repensa à la suite, et frissonna de nouveau.
Décidément, non, il n’avait pas de chance.


Par une journée ensoleillée, sa sœur était venue le voir. Ils avaient discutés à une table, protégés par l’ombre du pommier.
Sarah Fergunson avait alors remarqué que son frère était étrange. Il semblait inquiet, et paraissait ne l’écouter qu’à moitié. Lorsqu'elle comprit que c'était parce qu'il demeurait fixé sur ce grand pommier, elle l’observa à son tour. Il devait bien faire une vingtaine de mètres. Sarah porta alors son attention aux fruits de l’arbre, de belles pommes d'un rouge appétissant. En même temps, c'était la saison. Elle en cueillit une.
Et s’arrêta net.
Avait-elle entendu un cri en provenance du tronc ? Non, bien entendu. Elle sourit, et croqua dans la pomme.
Un nouveau cri retentit. Mais cette fois, il venait de son frère. Étrangement, cela ne l'inquiéta pas. Au contraire, elle était tout à coup incroyablement détendue. Soudain, sans préambule, elle se sentit terriblement mal, comme si un grand vide s’étendait dans son corps entier. Sans trop savoir pourquoi, elle cria à son tour.
Puis cessa simplement de vivre.


Alors que M. Fergunson repensait à sa sœur, il maudit cet arbre une fois de plus. Il n’avait pas prévenu la police, bien sûr. Comment l’expliquer ? « Ma sœur est morte empoisonnée et c’est la faute du pommier. » Bien sûr, ils n’allaient pas le croire. Mais il n’était pas fou. Soit quelqu’un lui jouait des mauvais tours, soit cet arbre...était... et bien M. Fergunson ne savait plus vraiment quoi penser.
Donc non, il n’avait pas prévenu la police.
Il avait pris une pelle, creusé un trou dans son jardin, et y avait mis le cadavre de sa sœur.
En une heure, le trou était bouché.
Mais, fou de rage, il avait alors donné un coup de pelle dans ce pommier de malheur.
Avait-il, à ce moment précis, entendu un cri ?


M. Fergunson était toujours étendu sur son lit, le sommeil tardant à venir. Il détourna le regard de la fenêtre, regardant à nouveau la terre sur ses mains.
Non, cela ne pouvait pas se passer comme ça. Dès demain, il allait appeler quelqu’un pour déraciner cet arbre. Peu importe le prix. Le pommier ne serait plus qu’un lointain et très mauvais souvenir.
Il s’endormit.


M. Fergunson rêva. Il rêva de sa sœur qui l’appelait. De l’histoire de la maison, du meurtrier qui l’avait habitée. De son corps disparu. Il vit un homme blond lui parler. Le meurtrier, semblait-t-il. Ses propos n’étaient pas plus compréhensibles que ceux de la pauvre vieille. Mais l'homme continuait de lui parler, alors que la sœur du pauvre vieil homme criait de plus belle, lui hurlant qu’elle était bloquée. Puis elle se tut. L’homme blond le regarda alors durant ce qu’il semblait être une éternité. Au moment où son regard d'acier commença à s'intensifier, M. Fergunson se réveilla.


Le déracineur arriva dans l’après-midi. Assez froidement, le retraité lui avait demandé de venir incognito. L’homme, un dénommé Cyril, et la femme, Stéphanie, observèrent l’arbre et le jardin puis commencèrent à sortir leurs outils. Pendant que la femme s’occupait de la paperasse avec le propriétaire, son compagnon commençait les premières manœuvres.
Après quelques secondes cependant, un cri retentit.
M. Fergunson ne s’était jamais sentit aussi mal.
Mais, contre toute attente, l’homme leur dit simplement de venir.
Pendant qu’ils accouraient, M. Fergunson remercia Dieu.
Cyril, pâle comme la mort, leur montra alors ce qui l'avait fait hurler ainsi.
Il avait commencé à déraciner l’arbre. Jusque-là, rien de notable.
Sauf que sous ses racines, on distinguait un cadavre.


Ce fut au tour de Stéphanie de pousser un cri.
M. Fergunson reconnut les cheveux jaunis, et pâlit instantanément. Aucun doute, c'était  le tueur de son rêve. Aussi étrange que cela puisse paraître, les racines et le corps ne faisaient maintenant plus qu’un. Stéphanie criait toujours, pendant que Cyril appelait la police. Et tout se passa ensuite très rapidement.
Une branche de l’arbre arracha violemment la femme du sol et l’emporta dans ses feuillages. Son cri s'estompa avec sa silhouette. Quant à Cyril, il s'était mis à courir et hurlait à son tour. Une racine lui attrapa alors le pied et l’emporta dans les tréfonds de la terre.
Mr Fergunson tomba à genoux. Il pleurait.
-Pourquoi, dit-il, pourquoi me laisses-tu vivant ?


Il fixa le cadavre et reconnut le regard de son cauchemar. Et il était persuadé qu’il souriait.
Mais malgré tout, il n’obtint pas de réponse.
Traînant le pas, le vieil homme monta donc dans sa chambre. Il ne savait toujours pas quoi faire, et s’écroula sur son lit. Une sirène retentit alors. La police. La voiture s’arrêta devant chez lui. Ils entrèrent dans la propriété par la porte de derrière, par le jardin.
M. Fergunson, qui les observait depuis sa fenêtre, pria lorsqu'ils passèrent devant le pommier.
L’arbre s’anima. Et ce n’était pas le vent.
M. Fergunson détourna les yeux, regardant ailleurs. Des cris retentirent.


Décidément, il n’aimait pas cet arbre.

Texte de Tac

NoEnd House


Temps approximatif de lecture : 26 minutes. 

Pour commencer, je me dois de préciser que Peter Terry était addict à l'héroïne.

Nous étions amis à l'université, et nous avons continué de nous voir après que j'ai eu mon diplôme. J'insiste sur le "je". Il a abandonné la fac après deux années passées de justesse. Après avoir quitté ma chambre du campus pour un petit appartement, je n’ai plus vu Peter autant qu'avant. Nous parlions par messagerie de temps en temps (AIM était roi à l'époque, avant que Facebook s'implante). Il y a eu une période où il n’a plus été en ligne pendant cinq semaines d’affilée, mais je ne m'en inquiétais pas. Toxico qu'il était, il était connu pour se ficher un peu de tout, je supposais qu'il m'avait oublié. Puis, une nuit, je l’ai vu se connecter. Il m’a envoyé un message avant que je puisse lancer la conversation.

« David, mon vieux, il faut qu’on parle. »